Le crédit d’impôt pour l’emploi à domicile est aujourd’hui dans le viseur du gouvernement. Souhaitant réaliser des économies budgétaires, Bercy envisage de revoir ce dispositif, qui permet à des millions de Français de financer en partie des services essentiels tels que le ménage, le jardinage, le soutien scolaire, l’assistance informatique, ou encore des services de petit bricolage.

Or, derrière ce crédit d’impôt souvent perçu comme une « niche fiscale », se cache en réalité un levier économique et social majeur, à la fois pour l’emploi local, le bien-être des familles et le soutien à domicile des personnes âgées.
Un secteur essentiel pour l’emploi et le lien social
Les services à la personne (SAP) jouent un rôle clé dans l’économie française :
- Ils représentent 7 % de l’emploi marchand en France.
- Ils sont utilisés par environ 4 millions de particuliers, via 3 modes de recours (emploi direct, prestataire, mandataire), et 5 types d’employeurs (particuliers employeurs, entreprises privées, associations, organismes publics, auto-entrepreneurs).
- Toutes les catégories sociales y ont recours, y consacrant en moyenne près de 10 % de leur budget, quel que soit leur niveau de vie.
Le crédit d’impôt, qui bénéficie à environ 9,5 millions de foyers, constitue un soutien financier indispensable pour l’accès à l’emploi à domicile. Il s’applique aussi bien aux actifs qu’aux retraités ou demandeurs d’emploi, domiciliés fiscalement en France, pour leur résidence principale ou secondaire.
Le secteur emploie environ 1,5 million d’intervenants (y compris les assistantes maternelles), issus de populations très diverses, dont l’intégration sur le marché du travail est un enjeu social majeur.
Les conditions d’emploi à domicile y sont attractives : les salaires nets proposés sont en moyenne 20 à 30 % plus élevés que dans d’autres secteurs similaires tels que l’hôtellerie-restauration ou le ménage en entreprises.
Et les besoins continuent de croître : à l’horizon 2030, plus de 500 000 personnes devront être recrutées pour répondre à la demande croissante du secteur.
Une dynamique portée par des évolutions sociétales
La demande de services à la personne augmente structurellement d’environ 1 % par an, portée par :
- le vieillissement de la population,
- la hausse du taux d’activité des femmes,
- l’augmentation du nombre de familles monoparentales.
Ces tendances lourdes rendent indispensable un cadre stable et incitatif pour accompagner le développement de l’emploi à domicile déclaré dans le secteur.

Un cadre réglementaire régulièrement menacé
L’évolution de l’emploi à domicile déclaré dans le secteur est directement liée à l’évolution du cadre réglementaire.
Les années 2010 à 2015 ont été marquées par :
- la suppression du régime de cotisation au forfait,
- un climat de menaces récurrentes sur le maintien du crédit d’impôt.
Cet environnement instable a eu des conséquences dramatiques :
- la destruction de 140 000 emplois,
- une remontée du travail non déclaré autour de 45 % en 2016.
Les entreprises du secteur restent fragilisées par ces va-et-vient réglementaires.
Pour garantir un développement pérenne, il est crucial de maintenir un cadre fiscal et social stable, qui encourage l’emploi déclaré.
Un dispositif partiellement sous menace
Dans le cadre des 40 milliards d’euros d’économies que le gouvernement cherche à réaliser pour le budget 2026, le crédit d’impôt pour les services à la personne est actuellement sous discussion.
Cependant, la ministre chargée des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a précisé que le gouvernement ne supprimerait pas l’avantage fiscal pour la garde d’enfants ni pour l’accompagnement des personnes âgées.
Sur les 27 métiers que représente le secteur des services à la personne, 2 seraient donc épargnés : la garde d’enfants et l’aide aux personnes âgées.
Ce sont donc principalement les autres activités du secteur de l’emploi à domicile qui sont aujourd’hui sous menace :
- ménage à domicile,
- jardinage,
- soutien scolaire,
- petit bricolage,
- assistance informatique, etc.
Ces activités représentent pourtant un complément essentiel de revenus pour de nombreux intervenants, et répondent à des besoins concrets des familles au quotidien.
Un recul de ces dispositifs risquerait d’entraîner :
- une hausse du travail non déclaré,
- la fragilisation de nombreuses entreprises du secteur,
- et une perte nette pour les finances publiques, compte tenu du retour sur investissement démontré par les études.
Un dispositif qui favorise l’emploi déclaré
Avant la mise en place du crédit d’impôt, le secteur était massivement touché par le travail au noir : plus de 70 % des emplois échappaient aux cotisations sociales.
Grâce au crédit d’impôt et à la simplification des démarches, ce taux a chuté à environ 40 % aujourd’hui, permettant à des centaines de milliers de salariés de bénéficier :
- d’une couverture sociale complète (maladie, retraite),
- de droits à la formation,
- d’un emploi sécurisé.
Pour les particuliers employeurs, ce dispositif a rendu l’emploi à domicile déclaré accessible, en allégeant significativement le coût final.
Un coût largement compensé
Le crédit d’impôt pour l’emploi à domicile représente un coût brut d’environ 6 milliards d’euros par an pour l’État.
Mais ce chiffre est trompeur :
- près de 5 milliards sont récupérés sous forme de cotisations sociales, collectées par l’URSSAF ;
- s’ajoutent les recettes de TVA, perçues par l’État via la Direction générale des finances publiques (DGFIP).
Le coût net pour les finances publiques est donc bien inférieur au montant brut affiché.
Un véritable effet multiplicateur
Le secteur des services à la personne est un investissement qui rapporte plus qu’il ne coûte à la société française.
Selon une étude du cabinet Oliver Wyman, chaque euro investi dans le secteur des services à la personne génère entre 1,19 € et 1,48 € de recettes fiscales et sociales.
Dans le détail :
- le calcul du retour sur investissement pour les finances publiques montre un ratio de 1,48 € de retour pour chaque euro investi dans le secteur en 2021 (source : Oliver Wyman – Services à la personne).
La majorité de ce retour provient de recettes directes :
- cotisations sociales,
- impôt sur les sociétés,
- TVA,
- taxe sur les salaires des associations,
- réduction des dépenses de chômage.
En résumé : 1 euro investi rapporte plus d’1,48 euro à la collectivité. Nous sommes donc loin d’un simple « cadeau fiscal » — c’est un véritable cercle vertueux.
Ne pas remettre en cause ce qui marche
Le crédit d’impôt pour l’emploi à domicile est un outil essentiel pour accompagner l’évolution de notre société.
Il permet à des millions de Français — familles, parents actifs, personnes dépendantes, seniors — de bénéficier de services à domicile de qualité, tout en soutenant l’emploi déclaré dans un secteur qui recrute massivement et intègre des publics souvent éloignés de l’emploi.
Ce dispositif représente également un investissement rentable pour la collectivité : il génère des cotisations sociales, des recettes fiscales, réduit le travail au noir, et favorise la création d’emplois locaux non délocalisables.
Vouloir le remettre en cause serait non seulement une erreur sociale et économique, mais aussi le signe d’une certaine facilité budgétaire : plutôt que de s’atteler aux réformes structurelles nécessaires, l’État choisit une fois de plus de chercher de nouvelles recettes en fragilisant des secteurs vertueux qui répondent à de vrais besoins des Français.
Au sein du Groupe Dame de Compagnie, que ce soit à travers nos agences de services à la personne, notre cabinet de recrutement, ou notre organisme de formation, nous mesurons chaque jour l’utilité de ce dispositif pour des milliers de familles et pour l’économie de proximité.
Nous espérons qu’il sera préservé dans son intégralité.